Nougaro chantait Ô mon paîs, Ô Toulouse...À mon tour, je reprendrais Ô Mauléon ! Mais qu'est-ce qui me rattache au village de mon enfance, mis à part son charme à flanc de montagne où le temps paraissait s'écouler moins vite, comme figé dans une époque ? En réalité, ce sont ces innombrables souvenirs gravés sur chacune de ses pierres. Ma grand-mère dans sa cuisine, le sourire de ma mère, la canne de mon grand-père, mes amis d'enfance, ses fontaines où l'eau était si claire, la vieille place de Palouman...Mais aussi, le buraliste qui vendait ses paquets de cigarettes et sa presse dans une pièce de sa maison, transformée pour l'occasion en bureau de tabac.
Quand nous passions sa porte, une clochette annonçait notre venue et il arrivait, immense, avec son béret et ses sabots, accompagné de son horrible roquet. "J'arrrrive" disait-il en roulant les R. Le parquet grinçait sous ses pas et nous le suivions sans oser faire davantage de bruit. Lorsqu'il encaissait nos achats, il nous rendait la monnaie en transformant oralement les centimes en centimètres et nous l'entendions ajouter "vingt centimètrrrres"
Sur la place, avec les copains, nous nous moquions gentiment de monsieur Z et l'imaginions épeler son nom de famille ou la lettre R ne manquerait pas de le faire ronronner un temps, tout comme l'embrayage de sa voiture qui crissait et que l'on entendait jusqu'à l'autre bout du village !
Quant à son épouse, elle distribuait à vélo le journal dans les innombrables boîtes aux lettres, suivie de son immonde chien, que nous avions baptisé Hercule. D'ailleurs, nous espérions qu'il passe un jour sous les roues d'un camion (je plaisante !). Plutôt sévère, elle ne souriait que très rarement, mais je peux vous assurer qu'elle avait des jambes en béton.
Finalement, il était plutôt sympathique le couple de buraliste, mais à l'époque, le respect que nous avions pour les adultes nous gardait à une certaine distance.
À mon dernier passage, je l'ai trouvé bien triste le village, comme vidé de ses âmes. Celles qui nous enchantaient...
Comments